L’automatisation de la fonction finance présente de nombreux avantages. Mais la simple évocation du terme est une source d’inquiétude et peut faire tomber à l’eau tout effort d’introduction.
Dans une enquête réalisée en 2022 par PwC, 55 % des directeurs financiers interrogés ont déclaré que leur entreprise n’utilisait pas ou très peu l’automatisation. Et lorsqu’on leur a demandé pourquoi, la réticence des collaborateurs est apparue en tête de liste.
Alors pourquoi les collaborateurs ne sont-ils pas enclins à adopter l’automatisation ? Quelles mesures peuvent-elles être prises pour y remédier ?
La peur de l’inconnu est le principal frein à l’adoption de l’automatisation. 65 % des employés craignent que la technologie ne devienne la raison de leur licenciement, même si les études montrent qu’elle crée en fait de nombreux emplois.
Alors que les processus manuels sont souvent désordonnés, chronophages et parfois frustrants, les abandonner au profit de nouvelles technologies non testées peut donner l’impression de faire un grand saut vers l’inconnu. En conséquence, certains peuvent commencer à chercher des raisons de rebrousser chemin.
D’après Accenture, les objections les plus courantes à l’automatisation de la fonction finance sont :
Et si la technologie devenait obsolète avant que vous ne puissiez commencer à en récolter les fruits ?
Les expériences passées jouent aussi un rôle important dans la prise de décision. Comme l’a fait remarquer Jim Buckle, de Gousto, dans un épisode de The CFO Playbook, les arguments de vente des entreprises promettant de « transformer votre fonction financière » se comptent par dizaines.
Il est facile de se laisser séduire par un produit qui n’est en fait pas adapté à ses besoins. Lorsqu’on consacre un nombre important d’heures et un budget conséquent à une technologie, pour finir par découvrir qu’elle ne répond pas aux besoins comme prévu initialement, il y a peu de chance que l’on se risque vers d’autres technologies similaires à l’avenir.
Si la peur de l’inconnu est source de méfiance à l’égard de l’automatisation, les aspects pratiques de sa mise en œuvre peuvent la rendre encore moins attrayante.
Bien qu’un fournisseur réputé soit en mesure d’apporter son aide sur les aspects techniques et former les collaborateurs tout déploiement technologique se base en fin de compte sur un travail d’équipe. Un effort dans lequel chacun doit jouer un rôle, en plus d’assurer ses tâches quotidiennes.
Le cabinet de conseil en transformation numérique Changefirst observe que, lorsque l’on est « porté par l’excitation de mettre en place une nouvelle technologie, il est souvent facile de négliger l’impact sur les collaborateurs et de surestimer le niveau d’engagement requis ».
Or, il est crucial d’obtenir cet engagement. Comme le fait remarquer Nick Rose, directeur financier d’Enable :
« Pour faire adhérer à une nouvelle technologie, vous devez fédérer les gens autour de vous. »
En d’autres termes, pourquoi un collaborateur passerait-il plusieurs mois à travailler de longues journées sur un projet s’il pense que, dans le meilleur des cas, le résultat final ne changera pas grand-chose pour lui et, dans le pire des cas, pourrait lui faire perdre son emploi ?
Il est à présent clair que si on souhaite que cet investissement dans l’automatisation porte ses fruits, on doit, comme le dit Nick Rose, « gagner le cœur et l’esprit des gens pour qui ce changement est réalisé ». Cela va de soi.
Si ceux qui sont amenés à être impliqués dans le déploiement (décideurs et utilisateurs finaux) sont convaincus que ce changement leur sera bénéfique, ils seront plus favorables à mener ce projet à bien. Et, plus ils seront investis, plus ils seront susceptibles de fournir les efforts nécessaires pour sa mise en œuvre. Mais comment mettre tout le monde d’accord ?
N’importe quel guide sur la gestion du changement conseille de commencer par fixer des objectifs clairs et mesurables.
Mais ce que l’on oublie souvent, c’est que chaque équipe attendra inévitablement des choses différentes de l’automatisation. Alors que l’objectif du management peut par exemple être de réduire les coûts administratifs, une équipe financière peut avoir comme objectif d’éliminer la saisie manuelle des données.
Il est essentiel que les objectifs soient alignés, cela donnera le ton pour le reste du projet. C’est pourquoi il est primordial d’impliquer les collaborateurs dans le processus dès que possible, écouter et utiliser ce qu’ils ont à dire pour établir des consensus.
Qu’est-ce qui leur pose le plus de problèmes au quotidien ? Pourquoi ? Quel type d’automatisation leur serait le plus utile ?
En prenant le temps de comprendre les besoins des collaborateurs et en veillant à ce que les objectifs en soient le reflet, la transition vers l’automatisation se fera beaucoup plus facilement.
L’implication des équipes dès le début du processus présente un autre avantage important : elle leur donne le sentiment de jouer un rôle dans la prise de décision.
Nombreux sont ceux qui s’attendent au pire lorsqu’ils entendent le mot « automatisation ». Leur donner l’opportunité de mettre des mots sur leurs préoccupations, qu’il s’agisse de la peur de perdre leur emploi, d’inquiétudes quant au calendrier de mise en œuvre ou autres, c’est l’occasion de mettre fin aux idées reçues et expliquer en quoi cette nouvelle technologie leur sera bénéfique. Don Dixon, directeur financier de DataStax, affirme que :
« Les équipes veulent de la visibilité. Je n’essaie pas de leur cacher ce qui se passe. J’essaie au contraire de leur donner autant de visibilité que possible. De cette façon, ils pensent jouer un rôle important dans la prise de décision… et j’aimerais que ce soit le cas. »
Si vous avez déjà essayé de réduire le temps passé devant un écran, de remplacer les encas sucrés par des produits plus sains ou de faire plus de sport, vous savez à quel point il peut être difficile de faire en sorte que ces changements tiennent la route sur le long terme.
L’être humain est un fait d’habitudes. Et une fois que nous avons pris l’habitude de grignoter des biscuits devant la télévision, ou de faire défiler les fils d’actualités de nos réseaux sociaux avant d’aller dormir, ce comportement devient comme une seconde nature.
En entreprise, le changement est d’autant plus difficile, car les collaborateurs font souvent les choses de la même façon depuis de plusieurs années – ou, dans certains cas, des décennies.
Dans ce contexte, il est important de ne pas automatiser trop de choses à la fois.
Les experts en transformation numérique recommandent de commencer par les processus pour lesquels il y aura peu d’effort d’automatisation à faire, mais où l’automatisation aura un impact élevé, comme par exemple les dépenses des collaborateurs ou la petite caisse.
Cela présente plusieurs avantages :
Par exemple, l’automatisation du processus de gestion des frais de déplacement a été une révélation pour l’équipe financière de Shay Murtagh, spécialiste du béton préfabriqué. Gillian Murtagh, CEO et directrice, a partagé son expérience :
« Cela a été une grande avancée pour nous… l’équipe financière est désormais plus ouverte à l’essai de nouvelles technologies. »
Lorsqu’on choisit le bon logiciel et qu’on avance progressivement en assurant une formation adéquate, la grande majorité des collaborateurs devrait finir par s’adapter à cette nouvelle façon de faire.
Il y aura bien évidemment des personnes qui s’y feront plus rapidement et facilement que d’autres. Ces membres d’équipes sont essentiels à la réussite du projet, et peuvent aider à ouvrir la voie à des changements plus ambitieux par la suite.
Les utilisateurs expérimentés peuvent fournir des informations précieuses sur ce qui fonctionne bien et ce qui doit être amélioré. Ils peuvent également venir en aide à ceux qui ont plus de mal à s’adapter et devenir des évangélisateurs.
Comme l’observe judicieusement Nick Rose : « Il n’y a qu’une poignée de personnes que vous devez convaincre… »
Une fois que les membres de l’équipe seront convaincus que l’automatisation est effectivement une bonne chose (et qu’elle ne fera pas disparaître leur emploi), leur enthousiasme se répandra !